Alors, ici, la semaine de 35 heures… connaissent pas ! Et c’est rien de le dire !
Vous l’aurez compris, Lulu et moi avons débuté notre période de sédentarisation avec travail rémunéré en point de fixation.
Le Parlement
Un peu d’histoire tout d’abord. Vous le savez, la Nouvelle-Zélande est une monarchie parlementaire selon le modèle britannique et le chef de l’Etat n’est autre que cette chère Elizabeth II (d’ailleurs, selon un sondage récent, seulement 28% des Kiwis se prononcent en faveur d’une république). Elle est représentée par le Gouverneur de Nouvelle-Zélande et détient, symboliquement, le pouvoir exécutif. Comme Gordon Brown au Royaume-Uni, il y a ici un Premier ministre qui forme et dirige le gouvernement constitué des membres du parti majoritaire à l’Assemblée et de ses partis politiques alliés (là, on se rapproche d’un système que vous connaissez tous). En pays Kiwi, il s’agit d’une femme issue du Labour (centre-gauche) : Helen Clark, assurant son troisième mandat et ayant de sérieuses chances d’en accomplir un quatrième après les élections de fin 2008. Originalité locale, le plus haut mandat électoral néo-zélandais ne dure que trois ans. Ca veut dire, potentiellement, nouveau gouvernement et nouveau Premier ministre très régulièrement. Dans les faits, il est très rare qu’un parti ne reste au pouvoir que pour un temps aussi court et ils enchaînent bien souvent deux ou trois termes électoraux.
Autre originalité Kiwi, il n’existe qu’une seule et unique chambre des représentants (l’équivalent de la “House of Commons” britannique). Conçu originellement pour être un système bicaméral comme en France (où les deux chambres, l’Assemblée et le Sénat, forment le Parlement), la chambre haute néo-zélandaise (équivalent de la Chambre des Lords) a été dissoute dans les années 50. En effet, la Droite au pouvoir contrôlait totalement cette chambre grâce à un système de nominations qui en faisait un frein à la démocratie. Contrairement au sénateurs français, les membres de cette Chambre haute n’étaient pas élus mais nommés par le pouvoir (puisqu’il n’y a pas d’aristocratie héréditaire Néo-zélandaise) et ne pouvaient être destitués avant le terme de leur mandat (d’une longueur insultante de 7 ans il me semble). Et la Constitution NZ empêchait la dissolution pure et simple de cet organe du pouvoir. Seuls les propres membres de cette Chambre haute (qu’on appellera “sénateurs”) avaient ce pouvoir. Mais on imagine leur réflexion quand il leur a été suggéré de voter la disparition de leur propre mandat : c’est-à-dire la disparition d’un salaire substantiel et de nombreux privilèges… La Gauche (le Labour Party) a donc pris son mal en patience et a attendu sagement son heure. Une fois les élections remportées (dans les années 50 donc), elle a remplacé minutieusement et très consciencieusement chaque “sénateur” sortant par un fidèle opposant au système. Une fois la majorité atteinte dans cette Chambre, ces nouveaux sénateurs ont convoqué une réunion et, en moins de deux heures, le Sénat NZ faisait partie de l’Histoire. Ou comment dynamiter un système de l’intérieur !
Excusez cet interlude politico-historique mais mes amis historiens comprendront certainement ma fascination pour ce genre d’anecdotes… Tout comme mon intérêt pour le « folklore » qui entoure la cérémonie d’ouverture du Parlement, tous les trois ans, à chaque constitution d’un nouveau gouvernement. La reine (ou son représentant le gouverneur général) trône au centre de feu la Chambre haute et plein de gens très décorés défilent en procession en portant tout un tas d’objets symboliques (bah oui, il faut bien que la pièce où siégeait le sénat serve à quelque chose). D’ailleurs, pour ceux d’entre vous que l’architecture passionne, il est important de relever la forme très britannique de la pièce au siège le Parlement. Point d’amphithéâtre comme il en va de soi pour notre Assemblée Nationale bien-aimée. Ici comme à Londres, il s’agit d’une grande pièce rectangulaire où les deux partis politiques majoritaires se font face.
Pour ce qui est de l’organisation, au fond de la pièce, au centre face à l’entrée, trône le Speaker (« l’Orateur ») qui joue le rôle de Président de l’Assemblée. C’est une personnalité à part, dégagée des partis politiques, et d’une très haute stature (on ne plaisante pas, mais il porte quand même une très belle perruque blanche à bouclettes). De part et d’autre se répartissent les MPs (prononcé « ème-pise » pour « Members of Parliament ») : à sa droite, la Gauche, et à sa gauche, la Droite… …? … Le parti au pouvoir (le Labour actuellement) est surnommé les « Ayes » car ils votent en général yes (« oui ») et l’opposition les « Noes » puisqu’ils sont en général plutôt contre les proposition du Gouvernement.
D’autre part, plus un MP siège proche du Speaker, plus il est important au sein de son propre parti. Les membres du Gouvernement (obligatoirement tous MPs) occupent donc les sièges les plus proches du Speaker tandis que les membres du Shadow (le « gouvernement » fictif du parti d’opposition) leurs font face. Autant dire que les « petits » partis (le parti Maori, les Verts, le parti républicain, etc.) sont plutôt éloignés du Speaker et proches de la sortie (qui est aussi l’entrée). Tout un symbole !
Au centre de la pièce, face au Speaker (décidément central, comme vous pouvez le constater), est astucieusement disposée une grande table de travail, elle aussi très symbolique. En plus d’être une séparation effective entre les deux grands partis qui s’opposent, elle est un objet de première utilité. Au milieu de cette table sont disposés un certain nombre de casiers de bois dans lesquels reposent les dossiers les plus importants du moment et qui vont être débattu à l’ordre du jour. Symboliquement, un MP ou ministre qui s’exprime sur l’un de ces dossiers « descend » à la table et peut, si le besoin s’en fait sentir, matériellement s’en saisir. Ceux qui ont déjà vu Tony Blair, à la télévision, dans une de ses envolées lyriques au Parlement britannique, comprendront de quoi il en retourne.
Enfin, il y a les Whips (« fouets » en anglais) qui occupent les sièges proches de l’allée centrale et qui sont en fait les portes-parole de chaque parti. Cela leur permet une circulation plus facile dans la pièce et ils portent leur nom, il me semble, du fait que leur bras s’élève rapidement (ou « fouette » l’air) à chaque fois que le parti souhaite s’exprimer. Enfin, sauf pour les Verts qui ont décidé unilatéralement d’être représenté par un Shepard (« berger »), le fouet étant un symbole trop violent pour ces promoteurs de la paix. Seul le nom change…
Nous
Mais trêve de blabla. Assez parlé de notre environnement. Passons donc à notre quotidien et aux personnes que nous côtoyons fréquemment et, surtout, directement (bien qu’il nous arrive parfois de croiser des membres du gouvernement et autres MPs). Je parlerai surtout en mon nom et je laisserai à Lulu le soin de vous raconter ses propres expériences. Car travailler au Parlement, c’est la classe, mais c’est pas de tout repos.
Comme je l’évoquais en tout début de ce post (si, je vous jure, il y a une heure ou deux), nos semaines ne sont pas de tout repos. On travaille au catering (autrement dit la restauration) du Parlement, Lulu au café « Copperfield’s » et moi au Room service. La société qui nous emploie s’appelle Bellamy’s, membre du groupe mondial Compass. Voici pour le contexte. Pour la forme, notre contrat de travail est de 40 heures chacun, la durée légale en Nouvelle-Zélande. Dans les faits, par contre, il n’est pas rare que nous faisions de 5 à 10 heures d’extras par semaine. Je détiens pour l’instant un record (entre nous deux), la semaine dernière, où j’ai travaillé samedi et dimanche pour un total de 56 heures (payées 64 grâce au lundi de Pâques). C’est long ! Pour compenser, j’ai un week-end de trois jours cette semaine et « seulement » 42 heures au compteur. De son côté, Lulu fait régulièrement des semaines qui oscillent autour des 50 heures. Résultat, en deux semaines, on avait déjà économisé l’équivalent du prix de notre voiture (pas bien chère, il est vrai, mais tout de même). En fait, le plus dur, c’est surtout de se lever à 6h ou 6h30 tous les matins de la semaine, et parfois même le week-end.
Mais, heureusement, on a un super patron. Son nom est P.K., c’est lui qui nous a recruté et, honnêtement, c’est un peu pour lui qu’on a accepté de travailler pour Bellamy’s. La photo du mec avec un ballon de rugby et un maillot des Hurricanes en tête de ce post, c’est lui ! Mais on y reviendra. En réalité, ce n’est pas exactement notre patron, puisqu’il a quelqu’un au dessus de lui : Nicola, notre vraie patronne, la manager générale, celle qui signe notre paye ! Mais c’est lui notre interlocuteur le plus fréquent et c’est notre supérieur direct. P.K. est maori, serveur devenu manager, travailleur acharné, joueur et fan de rugby, efficace, toujours aimable et, surtout, un super patron ! Oui, je l’ai déjà dit, mais il mérite que je le répète. Dès notre entretien d’embauche, il a été franc et direct. Il avait besoin de nous, nous avions besoin d’un boulot, le deal était conclu. Il nous avait promis un poste au café et un poste au room service, nous les avons. Il avait évoqué la possibilité de faire des extras pour gagner plus d’argent, il nous en propose régulièrement (c’est pourquoi on se retrouve à faire des semaines de 50 heures, voire plus d’ailleurs). Il essaye de nous procurer à manger à chaque fois qu’on termine tard et il nous a même déjà payé un coup. Et puis, honnêtement, vous connaissez beaucoup de patrons qui sautent de joie en apprenant que vous supportez son équipe de rugby favorite et qui va même chercher des tickets pour aller voir le match ensemble ? Avec P.K., c’est confiance, respect et efficacité dans le travail. Détente et intérêts communs en dehors. On ne va pas se plaindre ! Et, au travail, c’est agréable de savoir qu’on vous fait confiance. D’abord, face à notre relatif inexpérience dans le domaine de la restauration, il nous a laissé le temps de comprendre, de nous adapter et d’apprendre. Ensuite (et très vite), il n’a pas hésité à nous confier certaines responsabilités. Comme celles, pour ma part, de déjà former deux nouvelles ou de tenir et organiser le bar au cours d’un cocktail, en présence de personnalités sportives ! (Lulu rajoute qu’elle aussi elle a des responsabilités et qu’elle s’occupe avec Jibé des tables dîtes réservées, sous entendue celles où l’on trouve tous les emmerdeurs…)
Ceci me permet d’enchaîner directement avec nos activités quotidiennes. Je l’ai dit et elle y reviendra, Lulu travaille au café du Parlement. C’est un des endroits les plus visibles en ce qui concerne la restauration. Il y a aussi un restaurant, uniquement ouvert le soir et beaucoup plus formel, et un bar, réservé aux parlementaires et associés, qui fait ses nuits tous les vendredis soirs. Mais tout le monde passe au café, que ce soit pour une pause rapide ou un déjeuner un peu plus poussé, sur place ou à emporter. Résultat, elle voit passer l’essentiel des MPs, des parlementaires, des gars de la sécu et du personnel. Pas mal comme position.
Ajout perso de Lulu :
Comme vous l’a dit Jibé, tout le monde passe au Café. Ce qui fait son bon lot de clients très cons comme de clients vraiment extras. Mon boulot, à l’origine, devait être de tenir la salle et les tables propres, apporter les assiettes et les cafés et débarrasser avant de nettoyer encore et encore. Ca me convenait, parce que l’anglais ça va mieux mais je ne suis pas non plus bilingue. Et puis, faut croire que je leur ai plu à mon équipe. En trois semaines, je suis maintenant en mesure de tout faire, les cafés, la caisse et la prise des commandes, calculer la recette de fin de journée… Et c’est ça qui est génial dans ce taf c’est qu’on fonctionne vraiment comme une équipe, même si chacun a ses atouts et ses défauts.
Commençons par Dennis, 20 ans, la tête dans le c** jusqu’à 14 heures, qui dit «Sweetass » à chacune de ses commandes, qui appelle tout le monde, gars de la sécu comme MPs « Bro’ » et qui se marre tout le temps. Il est super bon à la caisse sauf qu’il oublie de mettre des numéros de table et que je dois faire toute la salle avant de trouver à qui appartient l’assiette de nachos. Il a donné sa dém’ donc je n’aurai pas l’honneur de le connaître davantage mais il me fait penser à Romain (qui se reconnaîtra, je pense, quoi que Dennis n’est pas trop souvent en retard, lui !) Et il aime pas faire les cafés. C’est Trina qui s’en charge ! 24 ans, maorie et artiste dans l’âme. Elle fait des cœurs, des poissons, des visages et des smileys avec la mousse de ses Cafés, les clients adorent !! Elle est adorable avec moi et m’appelle tout le temps « Sweetie » et je trouve ça mignon. Elle prend le temps de me réexpliquer 15 fois la même chose, me corrige mon anglais, se marre quand je fais des phrases qui ne veulent rien dire et quand je répond au téléphone. Elle est super pro et serviable et organisée ! Parfait, parfait. Enfin, il y a Vassili, échappé d’Athènes depuis 8 ans, mon supérieur direct au Café. Comme tous les boss, il est un peu chiant. Il est patient avec moi mais me fait des remarques qui me saoulent. En fait, il est lunatique et fait partie des boss pour lesquels on bosse et non avec lesquels on bosse. Tout le contraire de PK. Mais bon, quand il est dans son bon jour, ça va. Et là, il est en vacances ! Allez, j’arrête de balancer sur lui parce qu’il a voulu me faire plaisir cette semaine et m’a apporté un Cd de Gainsbourg père et un autre de Gainsbourg fille. Alors me faire engueuler en plein rush sur « des p’tits trous, des p’tits trous », ça me fait marrer. A la cuisine, on a aussi Uati, le plongeur maori, Ha Youn, une coréenne trop mimi qui me met des salades et des fruits de côté, Mipa, le tongien et le chef de notre cuisine et Ben, du petit Café à emporter de juste à côté. Ils sont tous cool et j’aime bien l’ambiance.
Du côté des clients c’est mitigé et si dans l’ensemble, ils sont plutôt souriants et compréhensifs quand je les fais répéter, il reste les très méchants qui me cassent le moral et les très gentils qui me le remontent ! Par exemple, l’une d’entre eux, une secrétaire blondasse pétasse radasse (elles sont 3 ou 4 comme ça) qui sous prétexte qu’elles sont secrétaires (je dénigre pas mais c’est pas violent comme fonction) te considèrent comme une moins que rien et te balancent des commandes pour 5 personnes sans articuler et en regardant dans l’autre direction. Ensuite, elles te disent de mettre ça sur le compte de comme d’habitude mais toi, t’es nouvelle et tu ne sais pas parce que bah, t’es pas devin !! Elles prennent des grands cafés avec du lait de soja et des shots de vanille et réclament les marshmallows supposés accompagnés les chocolats chauds et non pas grossir leurs derrières déjà proéminents, lèvent les yeux au ciel quand tu leur annonces que parce qu’elles ne sont pas toutes seules, elles devront patienter 5 minutes (on a qu’une machine à café et de toutes façons, comme elles passent 5 fois par jour au Café, à croire qu’elles ne font que cela de la journée, elles en ont du temps…) et sourient quand elles se brûlent ! Y a aussi la vieille peau qui sous prétexte que t’es Française, te répète toute la commande en articulant comme si t’étais complètement débile et joint le geste à la parole, « Three Latte » avec les doigts, pour un peu qu’elle me mime la traite de la vache des fois que j’ai vraiment pas compris… On a aussi la ministre de je sais plus quoi qui ne veut pas du pain qui reste parce qu’elle préfère sûrement le choisir dans un nouveau paquet tout neuf !?! D’ailleurs, celle-là elle est tellement conne et exigeante que Trina m’a expliqué que c’était la seule à la servir parce qu’elle non seulement elle est bête mais en plus elle se plaint ! Histoire de ne pas vous pourrir la lecture avec tous ces vilains pas beaux, je vais maintenant vous présenter ceux que quand je les vois j’ai mon p’tit cœur qui fait boom ! Les gars de la sécu sont particulièrement gentils. Ca y est, je vous vois venir, gars de la sécu, vous vous dîtes, ils doivent être grands, costauds et mignons, c’est pour ça qu’elle les trouve gentils ! Bah, non. Tino, il doit avoir dans les 55 ans, 100 kilos, les cheveux blancs, des lunettes, des dents en moins et quand il me voit il me dit Bonjour en français. Comme environ la moitié des clients ! Le mot est passé qu’il y avait maintenant une petite française au Café. Alors, ils y vont de vos « merci meudame » ou « Bonne journait » et me donnent pile poil la bonne monnaie ou alors m’annoncent clairement leur commande avec des grands sourires et laissent leurs tables propres… des amours ! Ils m’ont tous aussi parlé de Pascal, un autre gars de la sécu, expatrié de Lourdes et qui me raconte avec son accent du sud qu’il est ici depuis 5 ans, mariage avec une Kiwi oblige ! C’est bien de l’avoir sous la main, pour les questions pratiques (parking, etc…) et en plus il est vachement sympa. Ensuite, il y a Maguie, qui fait partie du Staff du Parlement et qui a appris le français à l’Alliance Française de Wellington et qui me ramène ses devoirs pour que je les corrige. Je vais même peut-être lui donner des cours parce que son prof repart à Paris pour quelques mois. Et sans citer tous les MPs qui ont appris le français à l’école dont un (un ministre je crois) qui parle super bien français avec un très léger accent, c’est quand même super agréable de servir des gens qui font autant d’efforts avec moi…
L’autre bon côté de mon travail au Café c’est de pouvoir régulièrement remplir le frigo ! Bien sûr, nous ne sommes pas autorisés mais bien sûr on s’autorise quand même. Parce que choisir entre la poubelle ou mon estomac en fin de journée, les pertes elles rentrent direct à la maison. Alors, c’est souvent des muffins, des scones, parfois des suchis, des sandwichs, des tourtes, parfois des parts de gâteaux cuisinés maison, de la salade fraîche, bref, je repère tous les moments où on jette et je me présente avec mes tupperwares ! Au moment, de quitter le Café, je planque tout dans un sac poubelle et je descends à mon casier ! Astucieux et économique ! Je m’autorise même à faire une sélection de ce que je choisis parfois. Vraiment des fois, certains plats sont bizarres, malgré qu’ils soient anglais, ces Kiwis, ils ont une façon pas très diététique de se nourrir. Au petit déjeuner, il y a le buffet froid, céréales (dont les Weet-bix dégueus, barres de céréales sans goût et qui ressemble à du papier quand on les mange), fruits et porridge (soupe de céréales sans goût non plus) et le buffet chaud, saucisses, bacon, œufs brouillés ou pochés, toasts avec marmite (pâte à tartiner noire et salée), hash browns (purée frite), bref, quelle hygiène alimentaire. Ah j’oubliais, un des plats du matin c’est le French toast autrement dit le pain perdu mais accompagné par du Bacon, comme ils font ici, beurk ! A midi, il y a pas mal de trucs frits et des salades. Mais on peut commander des omelettes, des burgers, des steaks, des nachos avec un pot de crème fraîche, pas mal de sandwichs… En fait, c’est assez difficile de garder la ligne avec ce qui est proposé au Café ! A cela s’ajoutent les multiples muffins, scones et parts de gâteaux comme le fameux Lolly Cake (pâte sablée sucrée mélangée à des bonbons…). Et on rince tout ça avec des boissons énergétiques comme la Red Bull ou la V ou la Powerade ou le Coca… Du coup, on comprend maintenant le rythme de vie de nos collocs’ qui se lèvent tous les matins à 5 heures pour aller à la salle de sport avant de bosser et qui passent leurs week-ends à regarder des cassettes de gymnastique ou de yoga ou de vélo (les vélos étant installés sur un système qui permet de faire du vélo d’appartement avec un vélo normal, mais quel bonheur !) Sur ce, je vous repasse Jibé !
De mon côté, j’ai intégré l’équipe du Room service, une équipe qui, avec moi, comporte… deux personnes ! Ma collègue, Claudette, est Sud-africaine (malgré son prénom à consonance française). Sympa mais parfois un peu tatillon. Disons que, en vertu de son ancienneté, elle se prend parfois un peu pour mon boss. Ca a pu être énervant quelques fois, mais rien de trop sérieux. Au final, on s’entend plutôt bien et je pense que personne n’a rien à reprocher à notre service. En gros, on fait du service d’étage, comme dans un hôtel, sauf que nos clients sont au top du pouvoir exécutif et législatif néo-zélandais. Ca fait très pompeux, dit comme ça, mais ce n’est pas si différent que de servir dans un hôtel je pense. Ca fait juste plaisir de savoir qu’on apporte à manger au ministre de ci, au député de là, etc. J’ai même eu le plaisir d’apporter, par deux fois, le déjeuner personnel de notre Premier Ministre Helen Clark. C’est d’ailleurs une des choses qui peuvent surprendre à propos de notre pays d’accueil. On oublie bien souvent que la Nouvelle-Zélande reste un petit pays en terme de population (4 millions d’habitants). Mais quand on remarque à quel point les détenteurs du pouvoir peuvent être accessibles (et parfois même particulièrement disponibles et agréables), on se dit qu’il y a vraiment quelque chose spécial ici. Ainsi, je me retrouve à apporter des plateaux-repas aux décideurs, servir du thé et du café au gouvernement et à saluer la Premier Ministre. En un mot : sympa ! Et même si la paye n’est pas mirobolante, c’est plutôt agréable, pour un simple job !
Et heureusement que la plupart des parlementaires sont agréables, car ce n’est pas le cas de tous nos « collègues ». Je vous ai parlé de P.K. Lui, il est super. J’ai évoqué Nicola, la big boss, elle est pas méchante, mais elle reste la big boss ! Il y a aussi Erika, qui est en charge de recevoir les commandes et d’organiser le Room service. Toujours joyeuse. Un petit coup de mou ? Je fais un tour dans le bureau et je dis bonjour à Erika. Et hop, le moral regonflé à bloc. Car du côté cuisine, ce n’est pas toujours la fête. En bon serveur d’étage, je traverse les bâtiments de long en large, de Bowen à la Beehive, du 20e étage au sous-sol, avec ma cravate, mon gilet et mon talkie. Mais mon port d’attache demeure la cuisine centrale, digne d’un grand restaurant, celle qui abrite celui que tout le monde craint : le « Chef » ! Un Allemand avec un problème d’ego tellement démesuré que sa journée ne peut se dérouler sans qu’il ait passé ses nerfs sur quelqu’un. Du coup, toute son équipe, des commis tous plus agréables les uns que les autres (Joe, George, Wayne, Shannon…) au second chef (Shane), tout le monde en prend pour son grade. Il trouve toujours une bonne raison de faire une remarque désobligeante, son cheval de bataille étant le port de la toque hygiénique dans « sa » cuisine. Une cause tout à fait noble… sauf qu’il n’en porte jamais, lui ! Et il trouve même le moyen de venir nous importuner dans notre petite zone de Room service : et il y a trop de chariot par-ci, et pourquoi vous pliez les serviettes de cette façon par là, et laissez pas le frigo ouvert plus de 2 secondes par ci (heu pardon de l’ouvrir quand j’ai besoin !) et pourquoi tu marches dans ma cuisine par là (heu, j’y travaille !)… Bref, un cauchemar quand il est mal luné, un déplaisir quand tout va bien ! Et, en « fonction », c’est-à-dire lorsque Lulu et moi faisons des extras en tant que serveurs pour des banquets, des cocktails, des réceptions ou des dîners diplomatiques, le chef Manfred est encore plus imbuvable. L’autre jour, un repas de plus de 100 personnes pour seulement 5 serveurs (donc environ 20 personnes chacun, soit deux tablées) : la consigne était de prendre trois assiettes par trois assiettes, le plus vite possible, pour servir chacune des 10 personnes assises à chaque table. Et une fois toutes les assiettes servies, apporter les plats de légumes. La gueulante que je me suis pris parce que je ne prenais pas déjà les légumes, alors que j’en était uniquement à mes 3 premières assiettes ! Autre exemple : pendant les speechs, on doit sortir de la salle et attendre dans le couloir avant de recommencer à servir. Et le chef a trouvé le moyen d’engueuler la pauvre Phoebe (serveuse comme nous) parce qu’elle s’était assise !!! No comment !
A part ça, on n’a pas de vie… Sérieusement, le boulot nous prend beaucoup de temps. On se lève à 6h, on rentre, on mange, on dort. Le vendredi ou le samedi, on va voir notre petit match de rugby et tout va bien ! Si on ne fait pas carrière dans l’Histoire, le journalisme, la diplomatie ou la littérature, on sait désormais qu’on pourra en faire une dans la restauration ;-) Pour ceux qui pensaient que la Nouvelle-Zélande serait synonyme de vacances…
1 commentaire:
Bravo pour vos textes et illustrations, j'ai pris plaisir à vous lire.Heureusement qu'il y a eu ma naissance ce fameux 10 avril 68! Comment? ça aussi s'était une catastrophe? Gros bisous de tata Valou
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