Compagnons de voyage, bienvenue à Invercargill ! Accorchez vos ceintures, ce post s'annonce ardu et très très long...
Avant-propos
Autant vous prévenir tout de suite, on prend un peu de retard sur nos posts, n’ayant plus un accès aussi fréquent au Net. Mais d’ici une semaine ou deux, on vous distillera les dernières infos plus rapidement. Mais avant tout ça, revenons déjà sur notre séjour dans le Southland et notre avant-dernier Wwoofing avant l’arrivée de mon père…
Episode I : La menace du Southland
Ah, le Southland et sa « capitale » Invercargill, l’une des villes les plus au sud de la Nouvelle-Zélande. Autant vous le dire tout de suite, l’extrême sud est symbolisé par la ville de Bluff, une bourgade beaucoup plus petite et moins intéressante d’où partent les « trampeurs » de la Stewart Island. La Stewart Island ? La véritable île du Sud de la Nouvelle-Zélande, troisième par la taille mais tellement plus petite que le pays est généralement réduit à ses deux îles principales : l’île du Nord et l’ex-île du milieu, désormais île du Sud. Vous me suivez ? Ce n’est pas grave, on y reviendra…
Tant qu’on y est, certains d’entre vous ont peut-être buté sur le terme « trampeurs », quelques lignes plus haut. Un terme qui amuse toujours beaucoup Ann, notre hôtesse de la Golden Bay, immigrée anglaise qui ne se fait toujours pas à ce terme typiquement Kiwi. En gros, on pourrait le traduire par « randonneurs ». Mais la plupart des anglophones diraient « hikers ». En effet, « to tramp » signifie marcher d’un pas lourd, avec difficulté et effort, piétiner. On en a donc conclu que les chemins de rando néo-zélandais étaient si boueux que les Kiwis avaient opté pour ce terme. Une supposition qui s’avèrera assez exacte à la vue du Southland. A ce propos, revenons donc à nos moutons.
Lundi dernier, nous quittions le Fiordland le cœur gros et les yeux pleins d’étoiles pour gagner la région la plus « reculée » du pays. Car avant d’atteindre ce sacré Southland, on en avait entendu des vertes et des pas mûres sur le sujet. Des gentilles réflexions type « vous verrez, le Southland, c’est complètement perdu », « il n’y a rien à faire et rien à voir » ou « ils n’ont pas de goût dans cette région », jusqu’aux plus gratinées du genre « ce sont tous des alcooliques et des congénitaux », on ne savait plus trop à quoi s’attendre. Et il s’avère que la vérité est toute autre. Les gens du Southland, que le Lonely Planet décrivait autrefois comme des « pèquenots en chemises à carreaux et bottes de caoutchouc », sont parmi les plus accueillants et partageurs du pays ! Pourtant, le Lonely ne semble toujours pas apprécier les « sudistes » à leur juste valeur. Extraits choisis de l’édition 2008 : « Invercargill n’a toujours pas la faveur des voyageurs, malgré les efforts désespérés de ses habitants », ou « les jeunes garçons désoeuvrés du Southland patrouillent dans leurs vieilles autos tunnées pour draguer des filles aux coiffures ridicules sorties tout droit des années 80, ce qui témoigne bien de leur désoeuvrement »… Voilà un exemple du manque de respect dont souffre cette région.
Admettons que les coupes de cheveux ne soient pas toujours des plus heureuses et que la mode soit aux bottes en caoutchouc (ce qu’on comprend aisément compte tenu des précipitations saisonnières), le Southland n’a pas grand-chose à voir avec la description qui en est faite.
Alors oui, je vous dirais oui, il n’y a pas beaucoup à voir ou à visiter. Oui, d’accord, le Southland est détrempé. Oui, ok, il fait froid en hiver et le vent n’aide pas à vous réchauffer. Oui, c’est vrai, on a vu quelques coupes mulet de goût assez douteux. Et d’accord, quand on pose un pied à l’extérieur, on a plus l’impression de marcher sur l’eau que sur l’herbe autour. Mais, vous direz-je, les coupes de cheveux mulet ne sont-elles pas revenues à la mode en France ? A mon grand désespoir d’ailleurs… Et ce gazon si vert et si parfait ne sort pas de terre par miracle ! Quant aux chemises à carreaux, je n’en ai pas vu une seule. CQFD.
Une chose, par contre, qualifie à mes yeux le Southland : la générosité. Est-ce cette famille qui nous a accueillit ou un caractère intrinsèque aux gens du coin ? Je parierais plutôt sur la seconde proposition. Mais qui a bien pu nous accueillir si chaleureusement pour que notre opinion sur le Southland soit si positive, me demanderez-vous. Laissez-moi vous expliquer…
Episode II : Le Southland des clones
Nos hôtes d’Invercargill (plus précisément Woodlands) se prénomment Grant et Karen. Grant le jardinier et Karen l’assistante sociale. Et surtout ne pas oublier leurs deux adorables petites filles : Ruby et Maggie. Respectivement 8 et 4 ans, elles furent une source d’émerveillement quotidien pour vos deux Frenchies préférés !...
Lulu se permet ici une petite parenthèse pour insister sur nos hôtes et plus particulièrement sur nos petites hôtesses qui me font dire que tous les enfants kiwis ne sont pas comme Justin – la terreur. En effet, Ruby et Maggie sont deux charmantes enfants très bien élevées par leurs parents. Un bonheur et un grand repos pour nos nerfs. Premier exemple, Maggie nous a laissé sa chambre pour la semaine et les filles partagent donc la même chambre en attendant. Cela ne leur plaît pas mais elles ne le montrent pas. Décision des parents et non celle des enfants. Second exemple, Ruby s’excuse lorsqu’elle quitte la table et remercie sa maman pour le « lovely dinner ». Ca sonne comme une contrainte mais pas du tout, Ruby est sincère et a vraiment apprécié le repas de sa maman. Qu’on apprécie tous d’ailleurs.
La routine s’installe vite à Grove Bush. On se lève le matin aux cris et rires des filles vers 7h30 quand on n’a pas la visite d’un chat à la recherche d’un peu de calme… Précisons ici que la famille s’étant installée depuis moins de 6 mois dans la maison toujours en travaux, Grant n’a pas eu le temps de poser les portes. Donc pas de porte à notre chambre, ni de rideaux mais un grand lit pas trop mou et une couverture chauffante. Après le réveil, vient le petit-déj’ avec du bon muesli pour moi et du miel pour Jibé. Puis Karen part travailler (mercredi, jeudi et vendredi) quand Grant reste avec nous pour nous occuper de ses noisetiers. Il ira jardiner chez des particuliers le lundi et le mardi. Ainsi, Maggie, qui va à la maternelle un matin sur deux, a toujours l’un de ses deux parents pour s’occuper d’elle. Ruby, quant à elle, part prendre le bus scolaire qui vient la chercher à l’entrée de la propriété non sans oublier sa « lunch box » contenant des crackers, des fruits et un sandwich. En effet, il n’y a pas de cantine en Nouvelle-Zélande. Les enfants partent donc chaque matin avec un pique-nique qui traditionnellement se compose – mais heureusement ce n’est pas obligatoire – de beurre et de marmite (la pâte noire et salée sacrée des anglais) entre deux grosses tranches de pain. Comme nous dit Pat’ il faut avoir été élevé à la Marmite pour en apprécier le goût si particulier. Bref, tout le monde parti nous nous dirigeons vers le champ pour « pruner » (encore) les tout jeunes noisetiers plantés il y a 3 ans. Soit couper toutes les nouvelles pousses qui ne sont pas directement reliées au tronc. Le temps n’étant pas avec nous, nous sommes vite trempés et nous nous replions vers la grange ou nous allons mettre dans des pots toutes ses pousses qui feront peut-être plus tard des grands et vigoureux noisetiers. Malgré la pluie, nous viendrons à bout du champ et des pots et nous varierons notre travail par du plantage de jonquille ou d’un bébé chêne (le Versailles’s oak) choisit par nous de façon à ce que nos hôtes se souviennent de nous. Encore un geste qui nous a touché. Après seulement deux heures de boulot, aidés par Maggie lorsqu’elle n’est pas à la « Kindie », nous prenons le café. Hum… Une tradition qui devrait figurer dans les conditions du Wwoofing tant elle est bonne ! C’est toujours l’occasion de discuter, de casser la croûte pour une Maggie sans cesse affamée et un excellent moyen de se réchauffer.
Notre temps libre nous le passons au chaud dans la maison à jouer avec les filles à Happy Family soit l’équivalent du jeu des 7 familles mais avec seulement 4 membres pour chaque famille, Master, Mister, Misses et Miss. Et nous jouons à la version Maggie c'est-à-dire non pas « as-tu la mère ou le père ? » mais « as-tu un membre de telle ou telle famille ». C’est marrant car en plus de cela elle demande toujours pour la même famille qu’elle l’ait complète ou non. Nous allons également une matinée à l’école de Ruby, pour la soutenir à l’aide de nos panneaux d’encouragement fabriqué le matin même, au cours du tournois de toutes les écoles du coin, tournoi de Netball ! L’occasion d’en apprendre un peu plus sur ce sport que personne ne connaît en Europe et de partager la passion de la famille, les parents étant coach à l’école si besoin. Sinon, Ruby nous sollicite pour ses devoirs qui me semblent bien éloignée de ce que mes frangins ont à faire chaque soir. Il s’agit d’un grand devoir à étaler sur toute la semaine et à finir avant vendredi pour la correction en classe. Le devoir suit la leçon qui est formulée le lundi. Cette semaine le sujet sera la citoyenneté. Ou comment être un bon membre de la société dans des environnements différents. Ruby doit expliquer quels sont sa place et son rôle et ce successivement : au sein de sa famille, avec ses amis, dans son école ou pendant son temps libre. Pour cela, elle commence par faire 4 cases, une à remplir par soir. Nous faisons ensemble la première : la famille. Ruby explique qu’elle doit chaque soir nourrir les animaux car elle fait partie d’une équipe et que comme dans chaque équipe elle tient un rôle. Elle s’applique également à être une bonne hôtesse lorsqu’il y a des invités ! A cela s’ajoute une dizaine de mots à épeler parfaitement, de la lecture et c’est tout. M’enfin, c’est déjà bien mais pas de calculs ni de leçons d’histoire ou même de règles de grammaire ou de conjugaison. Peut-être parce que l’anglais est une langue plus simple que le français ou parce qu’elle n’a que 8 ans mais quand même cela me surprend. Toujours est-il qu’elle s’applique et que maman veille à ce que cela soit bien fait. Les devoirs finis et mes cheveux remis en place – les filles ayant découvert la longueur de ma tignasse et s’amusant à la tête à coiffer – nous passons à table. Karen est une excellente cuisinière et les filles boulottent tout ce qui passe sur la table. C’est d’ailleurs une des choses qui nous a amusé avec les filles, c’est qu’elles ont tout le temps faim mais qu’elles ne mangent que des bonnes choses, des fruits, des carottes, du pain… Mais quand je dis tout le temps c’est environ toutes les heures. Et elles aident pour tout. Elles râpent le fromage, mettent la table, et s’occupent des animaux. Parce qu’à Grove Bush on aime les bêtes. Au total, un lapin, deux moutons (Chocolat et Fraise), des poules et un coq (qui tous accourent vers vous quand vous arrivez près du panier à graines), un chien Cédric (qui dort sur le dos les pattes en l’air car il a mal à la hanche) et trois chats (Gandalf, Monkey et Wilba). Ces deux derniers ont été adoptés par les filles à la SPA et elles s’en occupent chacune à leur façon. Maggie aime beaucoup coiffer une Wilba de très bonne composition et Ruby prend de force une Monkey pour dormir avec elle, d’accord ou non. Au final, les chats ou chatons devrais-je dire, se laissent faire facilement. Après tout, ce ne sont que câlins et bisous. Et un régal pour nous que de rencontrer une famille aussi sympa. On se croirait dans un épisode de « La petite maison… », encore une fois, la religion en moins. On était bien nourri (nous vous ferons goûter la salade spéciale de Karen, betterave, graines de tournesol et cacahuètes), bien logés et nous avons passé une merveilleuse semaine dans cette région si méconnue. C’est pour cela que je laisse Jibé reprendre la plume pour en dévoiler les merveilles ou pour ne pas trop m’emporter vous faire découvrir certaines curiosités…
Episode III : La revanche du Southland
Hum le tuatara, cet animal fantastique, ce dinosaure des temps modernes, cet étrange lézard venu d’ailleurs ! Le tuatara, c’est l’animal endémique Néo-zélandais, l’animal qui a connu les dinosaures en personnes et qui leur a survécu. Le tuatara, un mélange entre un gros lézard, un iguane, un caméléon et un dragon. Le tuatara, c’est surtout une incroyable lenteur, une immobilité à faire pâlir le Mime Marceau et une longévité record. Plus de 150 ans de vie pour Henry, le plus vieux spécimen, qui vit au musée d’Invercargill et qui a survécu à un cancer il y a quelques années. Le tuatara, un animal qui ne subit pas le poids des années et dont l’existence semble se dérouler encore plus paisiblement que celle des tortues les moins actives. Pour vous dire, pendant le bon quart d’heure qu’on a passé à se regarder dans le blanc des yeux avec Henry, il n’a pas bougé d’une seule écaille, pas le moindre clignement de paupière, pas la moindre rotation du globe oculaire, et c’est à peine si on pouvait percevoir le mouvement de sa respiration.
Ceci dit, et pour bien cerner la bête une bonne fois pour toute, il semble important que je vous donne les détails clés :
- le cœur du Tuatara fonctionne à la vitesse supersonique de… 10 battements à l’heure ! Imaginez, ça fait un battement toutes les 6 minutes !! L’histoire ne dit pas si chaque mouvement de cœur prend 6 minutes à s’accomplir ou si son cœur bat à une vitesse normale et cesse de fonctionner pour les 5 minutes et 58 secondes restantes, mais on comprend déjà mieux ses records de longévité.
- Hé, le Tuatara, j’ai envie de dire, faut pas crâner !!! Nous aussi les humains si on faisait du 10 pulsations par heure on vivrait ‘achement vieux !
- Faisons un petit calcul : si on prend un rythme cardiaque humain moyen de 60 pulsations minute, ça nous fait du 3 600 par heure, donc du 86 400 par jour et du 31 536 000 par année (non bissextile). Si on considère ensuite qu’on vit environ 75 ans (et on ne prend même pas en compte les rythmes cardiaques des hyper stressés), ça nous fait environ 2 365 200 000 pulsations/vie (2,365 milliards, pas mal pour nos p’tits coeurs). De son côté, le tuatara fait du 10 pulsations par heure, ce qui nous ramène à 87 600 par an et donc 13 140 000 pulsations/vie (pour une vie de 150 ans en moyenne).
- En bref, comme le tuatara vit deux fois plus longtemps que l’humain grâce son rythme cardiaque ralenti, on peut considérer qu’il fait du 13 140 000 / 2 = 6 570 000 pulsations par vie humaine (6,5 millions). Il n’a donc pas grand mérite à vivre si longtemps vu la faible usure de son cœur. Ainsi, un cœur de tuatara ne permettrait pas à un humain de tenir plus de… 76 jours ! Ridicule (en admettant qu’on puisse évidemment greffer un cœur de tuatara sur un humain) !!
- Autre calcul improbable mais néanmoins intéressant : si un cœur humain battait au rythme du cœur « tuatarien », soit 10 battements par heure, il battrait 360 fois moins vite (rappelons que le cœur humain de notre exemple fait 3 600 pulsations par heure). Or, puisqu’un cœur humain peut tenir 75 ans à un rythme 360 fois plus élevé, on peut considérer qu’il tiendrait 360x75 = 27 000 années au rythme du tuatara… Alors le gros lézard peut aller se rhabiller avec ses 150 années.
- Mais ce dernier calcul n’est pas tout à fait exact, puisqu’il impliquerait que l’humain en question ne soit pas plus gros qu’un tuatara. Il convient donc de diviser ce résultat final par la différence de masse entre les deux espèce (le plus grand étant le corps à alimenter en sang, le plus fatigant cela devient pour le cœur). En considérant un poids moyen de 70 kilos pour un humain et de 2,5 kilos pour le tuatara, l’animal est 28 fois plus léger que l’humain. Ainsi, toutes proportions gardées, l’être humain pourrait vivre 964 ans au rythme du tuatara !!! Pas mal ! Le voilà peut-être le secret de la vie quasi-éternelle.
- Vous l’aurez compris, si vous ne voulez pas mourir jeune, ralentissez votre rythme cardiaque ! Avec un peu de chance, vous atteindrez peut-être le millénaire ! Reste à savoir si nous sommes capables de ralentir notre rythme à ce point. Car être un tuatara, ce n’est pas marrant tous les jours et, sans protection, il ne pourrait certainement pas survivre à de nombreux prédateurs. Imaginez : lorsque deux mâles tuataras se disputent un territoire ou une femelle, ils s’affrontent en brefs assauts de 3 à 5 secondes… Entre chaque assaut, ils ont besoin de 15 à 20 minutes de récupération !!! Voyez la scène, pif-paf-poum, trois coups de pattes et on se repose un quart d’heure… Ca frise le ridicule. Déjà qu’on se moque de ceux qui ne peuvent pas faire un 100 mètres sans cracher leurs poumons… Pour vivre 964 ans (au rythme du tuatara donc), il faudrait manger une fois par an, faire ses course tous les dix ans, travailler un jour dans sa vie et dormir le reste du temps ! Quant aux disputes pour une femelle (oups, pardon, une femme), c’est plus la guerre de Troie, c’est la guerre de 100 Ans !!! Bref, on n’est pas encore prêt de voir grandir nos arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-petits-enfants…
- Toujours est-il qu’il nous a bien fait marrer le Tuatara et que, rien que pour son charmant sourire (si je vous jure, on dirait presque un sourire) et la longévité de son espèce, on le respecte profondément l’animal. Big up donc, toi, le gardien des temps oubliés…
Tiens, et tant qu’on y est, il faut que je vous parle des dinosaures ! On reste dans le sujet. Figurez-vous que la théorie de leur disparition a enfin été élucidée (semble-t-il). Des archéologues Néo-zélandais ont bien gratté la terre et lu dans les cailloux (je me moque mais c’est juste pour titiller notre chère Lucie, qui se consacre à ce doux métier de « gratte fossiles ») et ont conclu qu’une météorite géante était tombée sur Terre il y a exactement 65 millions d’années (enfin exactement à un million près, quand on compte en dinosaure, une année n’a pas de sens). Résultat, scouic, plus de dinos ! Lulu et moi, nous étions restés à nos cours de CM1 et à l’interminable débat du bouleversement climatique, des météorites ou de l’ère glacière. Débat stérile s’il en était, il y a 15 ans de cela (et oui, on vieillit, déjà quinze années qu’on a quitté l’école primaire). Mais le problème semble résolu pour la Nouvelle-Zélande. (Lulu précise juste que ce n’est pas une simple liberté qu’aurait prise l’imprimeur des panneaux sur un seul et unique. Non, l’affirmation est redonnée sur chaque panneau informatif avec des précisions comme la liste des dégâts qui ont suivi l’impact de la météorite.) Alors on fait un appel à témoin : étiez-vous au courant ? Sortons-nous de notre hibernation historique ou la nouvelle ne se serez peut-être pas encore répandue sur la planète ? J’admets qu’on ne se met pas à parler des dinosaures tous les jours (après tout, ce ne sont que de gros lézards qui se doraient la pilule il y a bien longtemps et que l’homme n’a jamais connu) mais serait-il possible qu’une telle nouvelle nous soit passée au travers ? Ou la Nouvelle-Zélande serait la seule à avoir admis définitivement cette théorie ? A moins que ce ne soit que le musée d’Invercargill…
Le musée d’Invercargill, en voilà un sacré morceau. Un lieu aussi sympathique que bordélique. Un grand n’importe quoi qui mérite d’exister mais qui cherche sa raison d’être. L’exemple le plus flagrant : la salle du haut. Il suffit de se tenir au centre de cette pièce et de regarder dans chaque direction pour mieux comprendre.
Dans un coin, une exposition consacrée au fameux Burt Monroe, l’un des Néo-zélandais les plus connus. Mais si, vous savez, ce fada de moto qui a établit de nombreux records de vitesse en son temps, sur une bécane trafiquée dans son jardin… Un cinglé pour beaucoup, un génie pour les autres. Pour ceux qui ne le connaissent pas, je recommande le (récent) film avec Anthony Hopkins retraçant son œuvre et intitulé « The World’s fastest Indian ». Et souvenez-vous en, Burt Monroe est Kiwi, pas Australien ! Tout comme Russel Crowe…
Dans un autre coin de cette même pièce du musée, deux aquariums se battent en duel pour vous donner un aperçu de la faune maritime locale. On se tourne encore un peu et on aperçoit un section consacrée à… l’espace. Non, la Nouvelle-Zélande n’a toujours pas de programme spatial mais une station de contrôle de la station spatiale internationale (ISS) y a été installée par les Européens. Suffisant pour avoir 15m² dans le musée… Une dernière rotation pour découvrir les forages et analyses géologiques du coin. Je n’en ai rien retenu…
Bref, passons directement à la pièce suivante, consacrée aux stations d’observation maritime durant la Seconde Guerre mondiale. Il semblerait que la NZ ait vécu une période trouble dans les années 40, convaincue que le monde l’envahirait (un refuge aux antipodes, pourquoi pas ?). Toujours est-il que le gouvernement a envoyé des hommes sur toutes les petites îles les plus inhospitalières du coin pour surveiller le rivage. Résultat, un gouffre économique et une inutilité totale… Car, comme Kaz le chien géant de Punatapu, la Nouvelle-Zélande attend toujours ses premiers envahisseurs ! Et pour justifier ces dépenses, le gouvernement a essayé de trouver quelques mauvaises excuses qui font aujourd’hui bien rire les visiteurs du musée. Dans le même élan de générosité et de surveillance, le gouvernement avait aussi prévu un plan de secours pour les naufragés du coin. Il faut dire qu’entre 1864 et 1907, les îles Auckland furent le théâtre de pas moins de… 8 naufrages ! Or, 40 ans plus tard, les techniques de navigation s’étaient améliorées et les accidents se faisaient rares. Le gouvernement a pourtant prévu l’installation de sorte d’abris à l’intention de potentiels naufragés. On y trouvait vêtement, ustensiles de pêche, nécessaire de cuisine et gâteaux secs… Une bien noble action, mais désespérément inutile, aucun naufragé n’ayant jamais eu recours à ces abris (par manque de naufrage) ! Résultat : les biscuits secs sont aujourd’hui en vitrine au musée d’Invercargill !!! Il n’y à que les Kiwis pour se soucier des gens à ce point. C’est très commun ici d’aider son prochain, de là à aider l’hypothétique prochain là où personne n’habite, il n’y a vraiment que la Nouvelle-Zélande pour y penser. Vraiment généreux les gens d’ici.
Terminons notre visite du musée par un dernier inventaire des excentricités qu’on peut y trouver. Dans l’escalier, vous pourrez admirer une incroyable collection de clefs ! Un mec était passionné et a fait don de sa collec’ perso au musée, musée qui a dû se retrouver dans un embarras soudain ce jour-là. Il ne pouvait pas mettre toutes ces clefs dans un carton sans offenser la famille. Le conservateur a donc fait des « jolis tableaux » de clefs qu’il a eu l’idée d’exposer, dans l’escalier (faut pas pousser…). Ailleurs, on se coltine quelques tenues d’époque ou autres représentations de la faune environnante. Mais le best du best, mon objet favori du musée reste ce fauteuil d’époque Victorienne que j’ai moi-même rebaptisé le « on se fait la gueule » ! En France, vous devez tous connaître ce fauteuil en forme de « S » qu’on appelle une conversation (puisqu’il incite justement à la conversation, les deux utilisateurs se faisant face). Ici, ils ont inventé (ou importé d’Angleterre, cela mérite quelques recherches approfondies) une banquette carrée à quatre places où les utilisateurs s’asseyent dos à dos et en regardant chacun un coin différent de la pièce. Pour les jours de pluie, peut-être… Episode IV : Un nouveau Southland
Laissons donc là notre joli musée et voyageons quelques kilomètres plus au sud pour nous retrouver dans la charmante ville côtière de Bluff, renommée pour ses huîtres. N’étant pas moi-même un amateur, je ne saurais vous dire si ces dernières équivalent nos chères fines de claire Marennes-Oléronaises ! Je sais pourtant que les Kiwis semblent les aimer grasses et laiteuses. A ce propos, je dois dès à présent vous prévenir que tout est plus gros, ici, en NZ. Les huîtres font peut-être deux fois la taille des nôtres, alors que les moules sont certainement cinq fois plus grosses. Des moules que nous sommes d’ailleurs allés ramasser avec Karen, Grant, Ruby et Maggie. Pour Maggie, l’expérience fut de courte durée. A peine 3 minutes sur les rochers, pas la moindre moule dans son seau et elle se retrouve à la baille par la force des vagues. Du haut de ses 4 ans, elle a plutôt bien accepté la situation et a trouvé un refuge bien mérité dans la voiture. Une bonne centaine de moules géantes (15 à 20 centimètres de long) plus tard, nous la rejoignons et regagnons nos pénates temporaires. C’est alors que l’idée me vient. Grant a une petite forêt de pins sur son terrain et le coffre est rempli de moules… Il n’en faut pas plus pour une bonne églade ! Oléron power !!! Ceux d’entre vous qui ne connaissent pas ce charmant coin de France ne comprendront pas : il s’agit d’une façon très particulière de cuire les moules, à l’aide d’aiguilles de pin. Succulent ! Il s’agissait pourtant d’un demi-succès car, dois-je le rappeler, nous sommes en plein hiver et les aiguilles sont gorgées d’eau (voire plus haut). Un églade mouillée, mais une églade tout de même ! Yes, encore un coin de France qui connaît son heure de gloire grâce à nous. D’ailleurs, nos hôtes ont tellement apprécié l’idée et le résultat qu’ils se sont promis de retenter l’expérience d’eux-mêmes, l’été prochain, lorsque le climat le permettra davantage ! On vous a mis l’eau à la bouche ? Continuons alors sur notre lancée.
Episode V : Le Southland contre-attaque
Je dois dire que nous faisons assez régulièrement honneur à la gastronomie de notre cher pays d’origine. Après les croques-monsieur, les crêpes, la tarte à la tomate et moutarde à l’ancienne, la tarte à l’oignon, la raclette, la salade vosgienne, le hachis Parmentier, les îles flottantes et le (magnifique) gâteau au chocolat de Lulu, nous avions déjà ajouté la quiche lorraine à notre palmarès. Et ce, pas plus tard que la veille de l’églade ! Une bonne occasion de cuisiner avec Ruby et Maggie, ce qui fut plutôt amusant. Ceci dit, je ne sais pas combien d’entre vous ont déjà essayé de faire une pâte brisée à six mains, quatre d’entre elles ayant moins de 10 ans, mais c’est pas toujours simple. Marrant, mais parfois compliqué au niveau du résultat. Un résultat pourtant magnifique et un grand bravo à la recette de ma Lulu, qui va certainement faire très plaisir à son Pôpa Philou…
Mais n’étais-je pas en train de vous parler de Bluff ? Bluff, ou le sud du Sud. Un panneau vous rappelle à quel point vous êtes isolé dans ce territoire extrême. Toujours pas de Paris en vue, mais on confirme Londres à presque 19 000 kilomètres et l’Antarctique à moins de 5 000 ! Quant au nord de l’île du Nord, il n’est distant que de 1 400 km… Une distance relativement faible qui a étonné ma Lulu. (Cette dernière apprend à l’occasion que Hobart, ville aperçue à plusieurs reprises sur d’autres panneaux directionnels, se trouve être la plus grosse ville de Tasmanie. Voilà qui est fait !) Pourtant, devrais-je vous rappeler que la France ne fait même pas 1 000 km du nord au sud et que seul l’écart entre Brest et Strasbourg équivaut à ce millier, en ligne droite. Si cela peut vous donner une meilleure idée des proportions de ce pays aux quatre millions d’habitants…
A part le panneau, Bluff est censé être le meilleur point de vue sur la Stewart Island, l’île la plus au sud de la NZ. Mais avec le temps qu’on a eu ce jour-là, on n’a rien vu du tout. Pour le point de vue, il faudra repasser ! Assez décevant tout ça.
Episode VI : Le retour du Southland
Dernière chose à retenir du Southland, et surtout d’Invercargill, c’est la « Seriously Good Chocolate Company » ! Un petit café qui ne paye pas de mine mais cache en réalité une fabrique de chocolats artisanaux du plus bel effet ! Leur spécialité ? Les truffes aromatisées à différents vins !!! Miam… Sinon, Lulu et moi nous sommes aussi fait plaisir avec des lingots de chocolats. Le sien fourré à la fraise, le mien fourré aux marshmallows, aux cacahuètes et autres fruits confits (ils appellent d’ailleurs ce grand n’importe quoi chocolaté un « Rocky Road », à cause de son aspect) ! Un régal qui nous laissera d’ailleurs un très bon souvenir du coin, presque aussi bon que celui laissé par la visite de la fabrique de chocolats Cadbury à Dunedin… Mais ça, c’est déjà une autre histoire !
(yeah, Eglade power!)